Traversée du siècle en musique
Un homme et une femme passionnés par la musique, le jazz , le cadre les années trente et quarante, Leurs amis : Eddie Barclay, Charles Dealaunay, Alix Combelle, André Salvador, Aimé Barelli, Hubert Rostaing. Ce pourrait être un film, avec une pléiade de vedette, c’est simplement la vie de Daidy Boyer et de Roby Davis.
Robert DAVID, Roby est né à Paris 12 Décembre 1917,dans le quartier Latin, son père est tailleur originaire du Bourbonnais, sa mère couturière est d’origine Suisse né à St Gall.
Après le brevet il réussit le concours de dessinateur géographe et rentre en 1938 au service géographique (IGN) comme dessinateur et photographe.
Robert a une passion, la musique, depuis l’âge de 7 ans il apprend la musique, le violon jusqu’à sa découverte à 13 ans de Ray Ventura. Il passe du violon à la clarinette puis au saxo alto puis ténor.
Lorsque la guerre éclate, il est affecté à Saverne. Après l’offensive allemande de mai 1940, il connut la retraite, puis la débâcle et le retour à Paris après un passage par le village natal de son père dans l’Allier.
Il reprend son travail à L’IGN. La perspective d’une affectation outre mer le conduit à démissionner pour devenir musicien professionnel et rester auprès d’ Andrée Boyer sa fiancée.
Andrée (Daidy) Boyer, son père était inspecteur des théâtres lyriques, et propriétaire avec ses frères de la Closerie des Lilas. L’opéra, l’opéra comique, la musique classique constituaient son univers musical. A l’adolescence saturée de musique classique, elle découvre le Jazz à la Radio vers 1935, et se passionne pour les émissions du Hot Club de Jazz.
Durant l’hiver 1938 ses amis l’emmènent au siège du Hot Club de France, elle franchit la porte du 17 de la rue de Calais, le siège du Hot Club de France et de Jazz Hot, l’antre de Charles Delaunay, le fils des peintres Sonia et Robert Delaunay.
Durant l’été 1938 en raison des plaintes du voisinage le Hot Club déménage rue Chaptal, prés de la place de Clichy dans le 9 arrondissement, non loin de la rue de Calais Le Hot Club occupe un pavillon au fond d’une cour , rue Chaptal.
Daidy devient la femme de confiance de Charles Delaunay, secrétaire du Hot Club et manager de musiciens : Django Reinhardt et Alix Combelle, elle organise des tournées du Quintet du Hot Club de France de 1938 à 1940.
A l »arrivée des Allemands, nous retrouvons Daidy et la bande du Hot Club à Biarritz : Combelle, Rostaing, Louis Vola, Pierre Fouad, de la famille royale d’Egypte, batteur, là ils jouent au Jimmy’s qui appartenait au propriétaire du Melody’s à Pigalle. Avec le retour à la normale, Daidy et les musiciens remontent à Paris, comme Charles Delaunay un peu plus tard.
Charles Delaunay suite à la débâcle resta longtemps éloigné de Paris et confia à Daidy Boyer le soin de gérer le Hot Club et Jazz Hot. Il voulut même fermer et vendre pour partir aux Etats Unis sans succès. Il ne remonte à Paris que vers la mi novembre et trouve le 14 rue Chaptal transformé ! Le hot club fonctionne parfaitement et les concerts se succèdent. Charles Delaunay débarque et surprend ses amis lors d’un concert du Hot Club. Il découvre le pavillon de la rue Chaptal complètement transformé par Daidy Davis Une salle de repos avec boissons est réservé aux musiciens, la cave sert de studio d’enregistrement des disques Swing. Daidy s’est installée dans l’immeuble qui donne sur la rue Chaptal, de la elle surveille « l’empire du Hot Club et des disques Swing » et les musiciens. L’activité est intense, la demande de Jazz est forte et les musiciens ne chôment pas. Tout irait pour le mieux si la France n’était occupée par les allemands et gouverné par le maréchal Pétain qui met en place La révolution Nationale pour régénérer le Pays et la débarrasser de l’oisiveté des goûts douteux que sont le Jazz et la danse les lieux de divertissements sont fermés fin 1940.
En réponse à cette interdiction, les clubs privés prennent le relais. ‘Eddie Barclay , 20 ans, ouvre des clubs privés, où l’on danse et écoute du jazz. Il fonde l’Okay club avec Daidy Boyer à l’administration, au programme Roby Davis et son orchestre qui accompagne l’invité du jour: Django Reinhardt, Gus Viseur, au 8 rue Jean Goujon.
En 1941 Roby Davis et son orchestre remporte le tournoi des amateurs salle Gaveau. Ce jour là il rencontre aussi sa future femme, Daidy Boyer. Il rentre dans l’orchestre de Pierre Allier, trompettiste de jazz, et joue deux ans au Jazz de Paris où il rencontre : André Ekyan, saxophoniste, clarinettiste chef d’orchestre, Aimé Barelli, trompettiste, chef d’orchestre ,Django.
« Cocktail swing avec Roby DAVIS et son swingtette, en août : l’orchestre Nick GOULESCO, en octobre / novembre. »
Alix COMBELLE raconte (Jazz Magazine de mars 1961) : « J’entrais CHEZ Jane STICK, cabaret que Django et Hubert ROSTAING venaient de quitter. Marcelle Brévannes m’avait demandé de les remplacer … Nous avons inventé un genre que nous défendions en sextette : Roby DAVIS et moi au ténor sax et quatre musiciens de rythme : Léo CHAULIAC (piano), Lucien GALLOPAIN (guitare), Lucien SIMOENS (contrebasse) et Armand MOLINETTI (drums) » …
Passionné de Jazz, Roby est un des premiers abonnés à la revue du Jazz :Jazz Hot, et fréquente les clubs, et commence à jouer avec les musiciens comme Alexis Combelle, saxo ténor, ,chef d’orchestre, Pierre Fouad, batteur, Philippe Brun, trompettiste. Roby épouse Daidy Boyer en juillet 1941, en présence de Charles Delaunay, et du HCF qui fait l’aubade.
Il tourne en province avec l’accordéoniste swing chef d’orchestre, Roger Etlens.
Claude Normand, pianiste, compositeur et chef d’orchestre se souvient : » j’ai fait la connaissance de Roby au Club d’Eddy Barclay, rue Pierre Charron, en 1942. Roby était un charmant garçon et un excellent improvisateur. » Eddy Barclay avait un club de jazz rue Pierre Charron Le club 68 rue Pierre Charron dont Daidy Boyer assure l’organisation.
Anatole Massolier autre ami de Roby, a rencontré Roby lorsqu’il jouait avec l’orchestre de Jerry Mengo.
Jerry MENGO batterie, guitare, chef d’orchestre, compositeur, arrangeur, est né le 17 avril 1911 à Paris et décédé le 23 avril 1979. Jerry MENGO a débuté comme chanteur dans l’orchestre de GREGOR et ses Grégoriens. En 1935, il fait partie de l’orchestre de Rapha BROGIOTTI (où l’on trouve entre autres Alex RENARD (trompette) et Roger CHAPUT (guitare)) en tant que batteur et chanteur. Cette formation se produit aux Ambassadeurs. Il enregistre, en mars 1935, comme chanteur, quatre thèmes avec le Quintette du Hot Club de France. En novembre de la même année, il participe à un concert à l’Ecole Normale de Musique avec, notamment, Bill COLEMAN et Django REINHARDT. Il figure dans l’orchestre d’André EKYAN en 1935 / 1936. Il y joue aussi de la guitare. Début 1937, Jerry MENGO est engagé à Berlin comme chanteur au Quartier Latin, l’un des clubs les plus chics du Reich. Cette année là, il est batteur au PEER GYNT, thé dansant et cabaret élégant de la rue du Colisée à Paris et fait partie de l’orchestre de Bill COLEMAN. Fin 1938, il joue aux Ambassadeurs dans l’orchestre de Serge GLYCKSON (dont font partie Emile STERN et Christian WAGNER), lequel sera remplacé début 1939 par celui de Fred ADISON. Il entre comme batteur chez Ray VENTURA en 1939. De 1941 à 1943 / 1944, il remplace Alix COMBELLE comme directeur musical du meilleur grand orchestre de jazz français de l’époque : le Jazz de Paris et se charge également des orchestrations. Cette formation sera dissoute en 1945. André Salvador le frère ainé d’Henri, était un excellent guitariste, il a joué avec son frère Henri au Jimmy’s bar, haut lieu du jazz dans les années trente, puis avec Django au 68 rue Pierre Charron le 16 novembre 1940. Début 41 avec son frère il passe en zone libre et sont engagés par l’orchestre de Bernard Hilda.
En 1942 il remonte à Paris où il se produit à l’Heure Bleue où il chante dans l’orchestre de Claude Normand,, un cabaret fréquenté par les gestapistes, alors que lui-même était un résistant actif transportant les armes et munitions dans son étui de guitare ! Daidy Davis Boyer alors hébergé avec Roby chez lui se rappelle avec effroi des armes et munitions entreposées chez André, et de leur transport par André dans son étui de guitare à moto dans Paris.
Daidy Davis Boyer, manager de Django Reinhardt se souvient des escapades de Django, pour aller jouer l’argent des cachets avec son batteur et ami, Pierre Fouad, de la famille royale d’Egypte. Passionnés par le jeu , ils passaient des nuits à jouer, et à perdre des fortunes..
Au point que Daidy Davis Boyer cessa de payer directement les cachets à Django, car son épouse Laguine est venue se plaindre, Django ne rapportait pas assez d’argent pour lui permettre de nourrir correctement le petit Babick.
Pendant ce temps, Charles Delaunay parcourait la France allant d’un Hot Club à l’autre pour tenir des conférences, animer des soirées et organiser le réseau de résistance Prosper Physician du SOE, services secrets fondés par Churchill en 1941 et qui jouèrent un grand rôle en France dans leur soutien à la résistance tant en hommes qu’en matériel.
Roby joue avec Alexis Combelle début 1943.
Alix COMBELLE raconte (Jazz Magazine de mars 1961) : « J’entrais CHEZ Jane STICK, cabaret que Django et Hubert ROSTAING venaient de quitter. Marcelle Brévannes m’avait demandé de les remplacer er nous avons inventé un genre que nous défendions en sextette : Roby DAVIS et moi au ténor sax et quatre musiciens de rythme : Léo CHAULIAC (piano), Lucien GALLOPAIN (guitare), Lucien SIMOENS (contrebasse) et Armand MOLINETTI (drums) » …
Fin janvier , Roby est arrêté lors d’une rafle rue de Ventadour, entre l’Opéra Comique et le Palais Royal. Il est envoyé dans le cadre du STO en Autriche à Vienne. De février 1943 à janvier 1944, il travaille à l’Opéra de Vienne, dirigé alors par Fuertwangler, transportant les décors. Il donne aussi des cours de clarinettes à des travailleurs tchèques, et avec d’autres musiciens comme Roger Etlens, accordéoniste, son frère et Arthur Motta, batteur, il font partie d’une troupe qui joue dans les camps de travail et de prisonniers.
Roby profite d’une permission début 1944, pour rester à Paris. Avec Daidy et leurs deux enfants ils se réfugient chez leur ami, André Salvador.
Après le débarquement et la libération de Paris, Roby joue pour les soldats américains, et dans le temple du jazz Saint-Germain des Prés. Il retrouve l’orchestre de Jerry Mengo,, puis celui de Pierre Spiers, il tourne sur la côte l’été, il forme un quintet avec Riki Garson à la basse, Jacques Leroux au piano, Alain motet à la batterie. Pierre Spiers pianiste, organiste et chef d’orchestre, dirigeait l’orchestre de l’émission Télé Dimanche dans les années 60. Il a joué dans l’orchestre Jazz de Paris.
Jusqu’au début des années 60, il va accompagner et jouer aux quatre coins de la France. Daidy a quitté son métier de manager pour être impr‚sario de salles de spectacle sur la côte : Théâtre de verdure de Grasse, de Nice, Palais des festivals de Cannes et commence à tourner des chansons filmées, elle fait des émissions comme Télé Jazz, travaille pour Télé Monte Carlo, elle filme , les chanteurs qui passent dans ses lieux, et les vedettes de passage en France, comme Dizzy Gillespie, Gus Viseur, Kenny Clarke, Lou Bennett, Bill Coleman, Barney Willen, Babick Reinhardt, Les Mac Can, Berryl Bryden accompagnée de Nino Ferrer à la basse, Raymond Lepers au piano (père de JulienLepets )
La famille Davis Boyer accueillera lors de ses passages à Paris Dizzy Gillepsie, qui adorait la soupe de poisson et les moules marinières de Roby.
Avec l’arrivée du rock , Daidy va se lancer dans l’aventure du Scopitone et enregistre des centaines de « clips » en particulier dans leur villa du Cap d’Antibes Relâche. Les filles des Davis Boyer: Michèline, Liliane et Florence participent souvent aux clips. Roby participe à de nombreuses séances pour de nombreux chanteurs comme Christophe.
Roby sortira plusieurs disques disques dont le batteur n’est autre que Bobbie Clarke : Twist 1 & 2 chez Saphir en 1962, Madison, puis paroles et musiques en 1963.
Roby arrête sa carrière musicale vers 1965 pour se consacrer au dessin et devient directeur artistique d’une imprimerie. Les musiciens qui ont influencé Roby Davis : Coleman Hawkins saxo ténor, « est le premier saxophoniste ténor à avoir su donner dans les années 1920 un vrai son de qualité, plein et sensuel à cet instrument, qui n’était pas encore avant lui l’instrument emblématique du jazz et était peu utilisé dans ce genre. Il a ainsi inspiré plusieurs générations de saxophonistes. Ce son caractéristique ne fut remis en question que plus d’une décennie plus tard par l’autre saxophoniste ténor emblématique du middle jazz : Lester Young.
Source Wikipedia
Lester Young, Young lui opposa des solos aériens, semblant flotter sur le tempo de l’orchestre, tels des volutes de fumée. Sa connaissance profonde de l’harmonie, très rare à l’époque – il n’y avait pas d’écoles de jazz ! – lui permettait d’improviser dans toutes les situations, et il était connu pour ne jamais se répéter d’un solo sur l’autre, ce qui constitue l’idéal absolu d’un musicien de jazz. Don Byas, saxo ténor a joué dans les années 30 avec Lionel Hampton , Buck Clayton, puis dans les années 40 avec Charlie Christian, Thelonius Monk, Kenny Clarke, et remplaça Lester Young dans l’orchestre de Count Basie qui fit une partie de sa carrière en France de 1947 à 1952 Roby et Daidy ont fêté leurs noces d’or en 1989, sur une péniche à Paris en présence du tout Paris de la musique et du Jazz et bien sûr du fidèle Eddie Barclay.
Roby Davis a rejoint Django dans les nuages en 2004. Liliane Davis Boyer travaille à la restauration et la sauvegarde des archives vidéos de sa mère.
Jean Bachèlerie janvier 2011
Remerciements : Jean-Louis Rancurel, Liliane Davis Boyer, Daidy Davis Boyer, Anatole Massolier, Claude Normand.
Sources :
Wikipédia, Jazz Hot, archives N°52 février 1951, et n° 600, Mai 2003, et 616 supplément de décembre 2004
Le Jazz sous l’occupation de Gérard Régnier, L’Harmattan,2010,
Charles Delaunay et le Jazz en France d’Anne Legrand Editions du Layeur 2010,
L’aventure Scopitone Jean Charles Spagnetti Autrement 2010Sites Ray
Binder :
http://ray-binder.pagesperso-orange.fr/lieux_en_1943.html
Jean BACHELERIE