Pierre CAVALLI (Suisse)

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A la fin des années 1950, le rock débarque en France. Faisant le trajet inverse un musicien suisse parcourt les États Unis pour découvrir les techniques nouvelles qui allaient révolutionner le monde de la guitare électrique. Jusqu’alors cet instrument plat, à l’aspect et aux sons un peu froids n’inspiraient pas tellement les guitaristes, qui préféraient la chaleur rassurante du bois et des coffres larges.

Pierre Cavalli allait être un lien solide entre ces deux mondes. Curieux ce musicien de Jazz originaire de la Chaux de Fonds, (Suisse), né au début des années trente, refusa de classer les inspirations en fonction de la technique. Pour lui, tout instrument était intéressant.

Il rencontra aux États Unis un certain Les Paul et comprit très vite que toutes les formes de musique pouvaient bénéficier de l’électrification des guitares. Pierre aurait pu rester tranquillement à Lausanne, pour gérer le magasin d’instruments de musique que tenait son père prés de la place St François. Il préféra quitter très jeune le sérail de la famille Cavalli, pour faire d’abord de solides études de violon, tout en jouant de son instrument fétiche dans les cabarets . Puis il devint rapidement un virtuose très recherché dans tous les milieux.

De ses périples américains, il rapporta donc une technique époustouflante qui lui permet de monter son propre orchestre de variétés, mais aussi de servir la cause du jazz et un peu du rock moderne. C’est lui par exemple qui utilisa un des premiers la fameuse guitare double manche Gibson, faisant au passage croire à bon nombre de jeunes qu’il était un rocker converti.

Mais Pierre Cavalli allait bien plus loin. Sa technique inspira de nombreux musiciens désireux de se perfectionner dans la guitare. Comme il appréciait les choses nouvelles, il n’était pas rare de le rencontrer dans les caves à jazz, essayant de nouvelles techniques avec une ou plusieurs guitares, des amplificateurs et des chambres d’échos. Dans ce domaine, on peut dire aujourd’hui qu’il joua un rôle considérable pour apprendre aux jeunes l’art de la guitare électrique. Un peu à l’image de Jimi Hendrix, qui montra aux jeunes guitaristes la voie pour tirer des sons incroyables de leur instrument.

Cavalli fut donc un précurseur. Il n’utilisa que très peu son talent de musicien pour lui-même. Mais il paya beaucoup de sa personne pour communiquer son art.

A la mort de son père, dans le courant des années soixante, Pierre Cavalli dût rentrer à Lausanne pour aider sa belle mère à gérer le magasin. C’est dans son établissement qu’apparurent les premières Fender Stratocaster, Telecaster ou Jaguar dont les jeunes rockeux suisses rêvaient depuis des années. Pierre Cavalli était pour eux un conseiller permanent et avisé. Sans être un commerçant dans l’âme, il sut prendre le temps de former les novices, de leur montrer les techniques nouvelles.

Puis on le voyait repartir dans les boîtes de nuit où il aimait jouer des heures durant, avec les musiciens de jazz du monde entier. Il connut aussi des succès puisqu’il enregistra de nombreux disques. En France il était un des poulains d’Eddie Barclay qui avait repéré en lui un musicien d’avenir. C’est sous le label Barclay qu’il enregistra quelques titres de Duane Eddy ou Don Gibson arrangés très jazz mais soulignant une étonnante technique.

Passionné par l’études des insectes, dont il possédait une magnifique collection, Pierre Cavalli a continué de jouer de la guitare dans toute l’Europe jusqu’à sa mort en 1989 à Zürich, ville où il résida longtemps, jouant toujours beaucoup dans les caves à Jazz et dans les studios où il développa également de nouvelles techniques sur des instruments à cordes africains.

Christian SCHLATTER

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