Jacques Denjean

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Du Jazz aux tubes

La famille Denjean,originaire de l’Ariège, a eu deux enfants: Jacques et Claude. Leur père Lucien était comptable et leur mère Cécile directrice d’école, Cécile comme la patronne des musiciens.

Claude Denjean est né en mars 1924 et mort en novembre 1999 d’une crise cardiaque. Jacques Denjean est né 1929, décédé le 21 décembre 1995 à Paris.
Jacques Denjean s’est marié deux fois, avec une norvéginne, avec qui il a eu un enfant puis avec Monique qui lui donna un second enfant.

Doué pour la musique, Jacques fait le conservatoire de Paris et remporte le premier prix de piano en 1947. Ses racines musicales : Charlie Parker, les grands orchestres, Count Basie était son modèle, Woody Hermann, comme nous le rappelle Raymond Gimenès.

Ivan Julien se souvient que « Jacques Denjean aimait le Be bop et le jazz moderne, ainsi que la grande variété américaine dont Frank Sinatra, mais aussi le rock avec Elvis Presley. Ce n’était pas un malade des rythmes ».

Dés 1947 il se tourne vers le jazz, forme un trio avec Totole Masselier à la basse et René Montagioni à la guitare. On les retrouve en première partie du concert à Pleyel du big band de Dizzy Gillespie en 1948. Charles Delaunay, le promoteur du jazz le fait tourner en province. Jacques Denjean remporte en 1948 le prix de soliste au tournoi international des amateurs de jazz. En 1952 Le Trio Jacques DENJEAN se produit au BŒUF sur le TOIT .
Boeuf sur le toit.

Certains l’aiment froide: Pierre Dudan au centre, Jacques Denjean à droite, site l’amour du rock&roll

En 1951 il est recruté par l’orchestre de June Richmond, il y restera jusqu’en 1955.(1)il fait ainsi le tour du monde et passe près d’un an à New York. Il fait connaissance de la scène Jazz New-yorkaise et se perfectionne au contact des jazzmen américains. Il apprend ainsi à « sentir » la musique comme eux.
En 1956 il enregistre avec Gilles Thibaut (trompettiste, auteur compositeur) : Sablons 28-26, Nearness of you, Somebody loves me, April in Paris, Gilles Thibaut était le cousin de Colette Magny, il ajoué avec Sydney Bechet, il est devenu un parolier à succès de Claude François et Johnny Hallyday : que je t’aime, comme d’habitude, …

Ala fin des années 50, on découvre Jacques Denjean comme accompagnateur de Pierre Dudan (2), en studio mais aussi au cinéma dans des films comme “certains l’aiment froide” en 1959.Ala même époque, il se consacre beaucoup à la composition et aux arrangements pour diverses vedettes de la chanson. Il rejoint l’orchestre d’Alix Combelle en 1959, puis joue avec le New Orleans sound de Maxime Saury, avant de faire partie des double six. En 1961 nous retrouvons Jacques Denjean au Piano dans l’orchestre de Christian Chevallier aux cotés de Christian Garros, batterie, Jacques Bernard Hesse, basse et Raymond Gimenès guitare.

Le Jazz

En 1961 il fonde son big band. Jacques Denjean et son big band se rodent en enregistrant les premiers 45 tours chez Polydor en reprenant les succès du moment : Prés de la fontaine, ça tourne rond, blue moon, la pachanga, suivi de the twist, let’s twist again, tu peux la prendre ( you can have her), dum dum, puis en 1962, lover please, dream baby, en suivant notre amour, tu l’aimeras toujours dans un style proche des fameux Markeys de Booker T., ensuite Madison time, the Big M ‘de Mickey Baker), Hugle Bug et swingin the madison.

En mai 1962 on passe au Jazz , il dirige la séance d’ « Amoureusement votre » par Don Byas au studio Hoche à Paris, l’orchestre est composé de Don Byas saxo ténor (3), Georges Arvanitas, piano, Pierre Sim, basse, Philippe Combelle, batterie, Ivan Julien et Pierre Dutour aux trompettes, Raymond Guiot, flûte, Nat Peck, Raymond Katarzimsky, aux trombones, Raymond Fonsèque au tubas, Jacques Denjean à la baguette.

En juin 1962 L’heure du Big Band a sonné, il enregistre Jazz , est ovationné à la nuit du jazz et ouvre le festival de Jazz d’Antibes le 18 juillet . L’orchestre regroupe la fine fleur du jazz français Trompettes Ivan Julien Georges Bence, Pierre Dutour, Louis Laboucarié, trombone : Raymond Fonsèque, Michel Stekkar, François Guin, Michel Camicas, saxo alto : Jean Louis Chautemps, Jacques Nourédine, saxo ténor : Dominique Chanson, Gérard Badini,
saxo baryton : Henri Jouot, Piano Jacques Denjean, Guitare Paul Piguillem, basse Pierre Sim, Batterie Philippe Combelle.

Jacques Denjean et Fats Domino à Antibes Juan les Pins juillet 1962

Flash / Tenor Contest / Studio 1/ Honky Tonk Tonk : tous ces titres sont des compositions de Jacques Denjean. Walking / The Champ/ Saint Louis Blues/ / Halleluyah sont des reprises avec des arrangements de Jacques Denjean. Cet album est salué unanimement par la critique. C’est le Big Band national.

Jazz Hot 178 juillet aout 1962 consacre au Big Band de jacques Denjean, un long article sous la plume de Jef Gilson qui conclue : »Il me reste à parler d’un grand scandale, comment se fait il qu’il soit nécessaire d’aller à Rouen (sans minimiser l’importance de cette ville) pour entendre

Jacques Denjean et Fats Domino à Antibes Juan les Pins juillet 1962
le meilleur grand orchestre de Jazz d’Europe…il est incroyable que la RTF n’ait pas un orchestre de Jazz qui lui soit attaché, comme cela existe pour les grandes stations radiophoniques allemandes….d’autant plus que l’orchestre de Jacques Denjean dépasse en qualité de nombreux groupes américains célèbres. »

En aout 62 Jazz Hot à propos de la prestation du Big Band à Antibes –Juan les Pins écrit « Le plus grand orchestre de Jazz européen ? Oui mais on voudrait qu’il dure. »

Ces quelques lignes annonçaient l’arrivée du R & R qui allait changer radicalement le paysage musical, et l’industrie du disque qui allait prendre possesion de ce qui n’était plus qu’un marché.

 En 1963 Jacques Denjean connaît le succès avec La route (the hard way), qu’il compose et qui sera l’indicatif de l’émission de Roland forez sur France Inter le Collège du rythme, couplé avec the tough touch (dans le vent) une autre de ses compositions, indicatif de l’émission d’Europe 1 de Lucien Morisse et Michel Cogoni dans le vent, complété avec Sally go round the roses, et Mickey’s monkey. C’est sans doute La route et dans le vent qui restent dans la mémoire des auditeurs. Le son est magnifique, Jacques Denjean fait mieux que Booker T et les MG (les Markeys). Dans la même veine sortiront : en 1965 allo blues, douze cordes, écoutez-moi, music & news, en 1968 Jerk Poker, Névrose, en 1969 le téléphone, en 1977 radio nuit.

Pour Névrose couplé avec Psychomaniac; l’orchestre est formé de Raymond Gimenès, Francis Darizcuren, Jean Claude Oliver, aux guitares, Jean Luc Ponty, violon Paul Rovere, basse et André Arpino, batterie. Parmi les musiciens que nous n’avons pas cité et qui firent partie des musiciens de Jacques Denjean à un moment ou à un autre : Charles Lolo Bellonzi, le batteur, Maurice Vander, pianiste, Eddy Louiss, organiste, Arvanitas et Urtregger, pianistes, Bernard Lubat , percussionniste, qui a remplacé un autre percussionniste qui fera parler de lui Jean Claude Casadesus (futur fondateur et de l’orchestre philharmonique de Lille.)(4)
 “Jacques Denjean a constitué un orchestre comparable aux Mar-Keys Américains, mais plus dense en associant sur des rythmiques Rock, les sons Jazz de l’orgue et une section de saxophones et cuivres. Cet orchestre s’est illustré aussi bien dans l’accompagnement des stars de la génération yéyé que par des morceaux instrumentaux publiés pour lui. »comme l’écrit Mighty Groove du site : http://soul-in-groove.eklablog.com/jacquesdenjean

Les années tubes

Dés 1963 la réputation de Jacques Denjean est faite. Les directeurs artistiques sollicitent jacques denjean et son orchestre, ce fameux son qui est sa marque de fabrique. Les maisons de disque ont compris que leurs jeunes artistes ont besoin d’un orchestre avec un son accrocheur. Comme le dit Raymond Gimenès, » Avoir Denjean c’était une garantie de succès.

On le retrouve avec Johnny Hallyday en 1964 notamment à L’Olympia, et en studio il réalisera plusieurs séances en 1965 : mes yeux sont fous, dans ce train, reviens donc chez nous, va t en, rock and roll musique, plus je te regarde , pleurer auprès de toi, on a ses jours . il est l’arrangeur de différentes chansons jusqu’en 1979 : Adouble tours, avant, la prison des orphelins et toujours là . En 1963 Nana Mouskouri avec: à force de prier, la place vide, l’orage, t’en va pas comme ça, seule au monde, 1964 : au feu, en 1965 : le temps du chagrin, remets ton cœur à l’endroit, ce n’était rien, une rose de Paris, les Gams : il a le truc, une petite larme m’a trahie, my boy lolipop.

En 1964 Jacques Denjean accompagne Alain Barrière, dans un été, la Marie Joconde, attends, Lucky Blondo sur ton visage une larme, Marianne Mille oublie de pleurer, Monty : Thick tchang, rien, que me reste t il. On le retrouve coté Jazz comme arrangeur de September song et body soul par Maxime Saury.

En 1965 Jacques Denjean en accompagne Christophe :Aline, Les Marionnettes, je chante pour un ami, ainsi qu’avec Hervé Vilard : Capri c’est fini, Alain Barrière avec une maison vide, Sacha Distel Petit oiseau bleu, scandale dans la famille, Johnny Hallyday quand revient la nuit, le diable me pardonne, ma main au feu.
En 1965 il réunit Danielle Licari, Jackie Castan et Nadine Doukhan pour former un trio sous le nom Les frizz. Elles chantent de la musique afro américaine. Jacques Denjean les accompagnera sur deux albums et plusieurs 45 tours. Il est aussi le producteur du groupe. Danielle Licari deviendra une grande chanteuse de variétés et vendra beaucoup de disques.

François Deguelt quand nous reverrons nous, en Italie, 1966 : le printemps, les corsaires, 1967 : la plus jolie chanson du monde, my lovely love, 1968 quand l’amour viendra, minuit, le vent la nuit, le ciel, le soleil et la mer, 1972 les violons, en 1985 l’album le ciel le soleil et la mer.

En 1965 Salvador : le chien et la souris, la danse de Zorba, 1966 Juanita banana, quand faut y aller, 1967 :Attila est là, Patron, 1968 Ballade pour Bonnie & Clyde, 1969 mais non mais non.

En 1966 toujours avec Christophe : j’ai entendu la mer, Hervé Villard : Mourir ou vivre, le disque Sacha Show à l’Olympia avec aussi Dionne Warvick.

En 1967 Françoise Hardy avec voilà, au fond du rêve, qui peut dire, on trouve aussi jacques Denjean avec Marcel Amont : avec Pascal Danel la plage aux romantiques, Rika Zaraï : je partirai, Jérusalem en or.

La Normandie

En 1970 Jacques Denjean rachète un ferme en Normandie au Fidelaire, il la retape en studio d’enregistrement : le studio Frémontel. Il emploie des musiciens du coin trés doué Patrice Tison : Guitare électrique, François Bréant : Claviers, Albert Marcœur : Percussions, + Pascal Arroyo Basse., qui feront carrière.

Il accompagne Bashung dans un jour viendra, et David Christie Maria en 1971 On retrouve là Bruno Menny, ingénieur du son et bricoleur de musique électroacoustique. Dans son cafoutche, Bruno a des rideaux de bandes magnétiques.
Jacques Denjean a composé la musique de plusieurs films dont Adieu Philippine de Jacques Roziers (1960), il a dirigé la musique de l’homme d’Istanbul composé par Georges Garvarentz, (1970) il reprend le thème du voyeur (1972)… le cave serebiffe..

Jacques Denjean a marqué le paysage musical français de sa marque : un son unique en France, mêlant section cuivre et rythmique solide. Il restera comme un jazzman qui aura réussi dans la musique populaire tant avec ses titres phares comme la route et dans le vent, que par ses orchestrations de nombreux tubes. Il a écrit plus de 20 000 arrangements. Il est le fondateur du groove français.

Ivan Jullien se souvient d’ » un bosseur, gentil drôle et fidèle ,très aimé des musiciens » Musicien doué, chef d’orchestre avait su former une équipe avec la crème des musiciens de studio venus du jazz. Jacques Denjean était un homme apprécié pour ses qualités humaines par les musiciens qui l’ont côtoyé. Cette équipe était toujours disponible pour Jacques Denjean.

Ce n’est pas un hasard si parmi les nombreux musiciens que nous avons présenté dans ces colonnes, Jacques Denjean a fait appel à leurs services, citons Léo Petit, Jean Claude Oliver, Philippe Combelle, Lolo Bellonzi, Ivan Julien Raymond Gimenès, Totole Massolier, René Urtreger, Georges Arvanitas…

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